
Une neige de juillet

L'abysse

Au mont Sainte-Hélène

La dune

Things she said

Pourvu qu'elle soit douce

Il viendra des pluies douces

La naissance des pieuvres

Le borgne

Overbrained

109 97 148

Nous n'y sommes plus

Growing up in a concrete field

Le fumeur d'opium

Ne doute jamais de mon amour

Goodbye blue sky

The flying pear

Cyril's pear

Nature morte au micro-ondes

La poule martienne

Le Naufrage

Un taureau dans la reine
Eté soixante-treize. Je m’en souviens comme si c’était hier. Mon père peignait, ma mère lisait un roman d’Agatha Christie. Dans ce temps là des choses je ne suis pas en mesure de raconter ce que je faisais. Peut-être rien. Je rêvais, comme à mon habitude.
Je ne sais dire si les peintures de mon père me plaisaient. J’aimais l’odeur de la térébenthine tout comme j’appréciais le voir choisir les couleurs de sa toile.
Les livres de ma mère me sont restés mystérieux. A cette époque là, je n’étais pas en mesure de les comprendre. Aujourd’hui, si elle m’a donné le goût du lire, je ne partage pas ses lectures. Aimerait-elle mes auteurs japonais ?
Chaque jour et nuit, il pleuvait. Le temps passait doucement, mais il se faufilait sans laisser l’ennui prendre prise sur le cours des heures. Nous vivions notre été dans un cocon de ouate et de satin. Je n’avais nulle envie de sortir ni de jouer en dehors.
La pluie se fit violente. Le vent des montagnes immobilisa la vie dans un déluge de glaces. Il neigeait. Ce n’était pas une neige blanche, immaculée, celle dont on parle dans les livres de poésies des écoles. C’était un froid terrible, violent et acerbe. Ce furent des flocons qui piquent, laissant aux aventureux des traces sur la peau.
En quelques heures, elle enroba tout ce qui lui était donné de détruire. Ce fut bien plus qu’une avalanche ; ce fut un bouleversement. La vie est fragile. Elle est faite d’habitudes qui ne demandent pas à être contrariées.
Sur son passage, ce ne fut qu’arrachement. Tornade et déluge, les arbres volaient, les vitres tremblaient, le temps devenait fragile. Les natures mortes de mon père n’étaient plus que désolation. Les livres de ma mère se sont envolés vers des langues impossibles à traduire.
Par miracle disent certains, je suis resté en vie. Je ne sais pourquoi le ciel, ce jour d’été soixante-treize, m’a épargné. Peut-être avait-il le souhait que je me souvienne.
Des mots de Cyril Berthault-Jacquier pour
"Une neige de juillet". [ND&CBJ 2010]